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Clotilde en Syrie

Clotilde en Syrie
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24 janvier 2011

Noël, Dieu aime passionnément chaque Homme

 

Point-Cœur Bienheureuse Mariam  

Syrie – Alep  

Lettre n° 3

Très chers parrains, chère famille, chers amis,


A l’heure où je commence cette lettre, les magasins de Noël fleurissent en grand nombre à travers la ville: jouets, sapins, décorations de Noël illuminent les rues, donnant un air de fête à tout le quartier. Nous voilà entrés dans le temps de l’Avent. Me voilà entrée encore plus avant dans ma mission qui m’entraîne à me donner - et à recevoir - toujours plus.

Il est 16h30 maintenant, la nuit tombe lentement, au loin la prière des muezzins s’élève vers le Ciel et les klaxons se répondent joyeusement ; je vous écris dans le silence d’une petite chambre d’accueil du Carmel.


La fête de « Sainte Barbara » ou « Sainte Barbe » vient marquer le début de l’Avent. Le 4 décembre, cette fête fait mémoire d’une jeune fille, Barbara, qui se convertit au christianisme et qui emprisonnée par son père furieux, dut s’enfuir en secret. Rappelant le déguisement sous lequel elle se dissimula, les enfants continuent de se déguiser chaque année. Nous entonnons avec eux un chant à Sainte Barbara, nous dansons un peu au rythme du dabké, puis nous partageons un plat très spécial, le slïa, à base de blé, cuit dans le sucre et la cannelle, décoré de smarties et autres bonbons colorés. Beau moment de fête ! Sont présents ce jour-là une dizaine d’enfants et quelques adultes, dont

 

Mariam et son mari. La présence de Mariam est un vrai miracle !


Mariam, beauté et solitude d’une femme syrienne

Mariam, c’est notre voisine d’en face. Très proche du Point-Cœur depuis le début, elle nous considère comme ses filles : elle nous prépare de bons petits plats syriens dont elle nous apprend les recettes, appelle régulièrement pour prendre des nouvelles ou bien nous offre son beau sourire du haut de son balcon, accompagné d’un matinal « Sabar el reir !», « Bonjour ! » (ce qui signifie poétiquement « matin de bien » auquel il est d’usage de répondre « Sabar el nour », matin de lumière).

Dès les premières visites, Mariam avec toute sa simplicité de femme orientale s’ouvre à nous de ses difficultés, exprimant de cette manière sa solitude, son besoin d’être entourée. Pas facile et déconcertant au début d’entendre ses plaintes continuelles sur sa santé, son mari et ses enfants, sa maison et son pays… Mais au milieu de toutes ces plaintes, il y a toujours son sourire lumineux et affectueux, révélant son désir de se donner ! Et quelle confiance pour se donner ainsi à nous sans masque, sans artifice dès la première rencontre!

Depuis un an, elle souffre d’un mal de dos (les disques) et ne sort quasiment plus de chez elle. Habitant au 5ème étage d’un ancien immeuble alépin, il lui est très difficile de descendre les hautes marches de l’escalier en pierre. Pour venir chez nous le 4 décembre, elle a dû, après une descente douloureuse, se hisser encore péniblement jusqu’au 3ème étage de notre immeuble: cadeau inestimable que sa présence ce jour-là !

Sarkis, son mari est un peu jaloux, yaénni  (mot qui scande très fréquemment les discours syriens ; il signifie « en fait, c’est-à-dire »). Comme beaucoup de femmes ici, Mariam ne sort donc que rarement de chez elle, excepté pour faire quelques achats, mais c’est le mari ici qui fait les courses au souk. Une femme ne va pas se promener seule, et même, rarement se promener tout court. Mariam ne peut même pas aller au village voir sa maman pourtant très affaiblie par l’âge. Un jour, elle nous appelle pour nous annoncer le miracle qu’elle attendait depuis longtemps : demain elle part au village chez sa maman qu’elle n’a pas vu depuis quatre ans! Hamdella !

Ses deux grands garçons : Garo et Ovanès passent tout leur temps à étudier (ici, les études sont difficiles, le niveau est haut ; déjà à l’école primaire, les enfants travaillent beaucoup. Après l’école qui se termine vers 13h30, ils prennent des cours particuliers l’après-midi pour renforcer leurs connaissances ; ils ont peu de loisir et ne font pas de sport, ce n’est pas dans la culture). L’appartement n’est pas grand et le salon, petite pièce exiguë, sert un peu à tout : prendre les repas en famille, étudier pour les garçons, se reposer sur le canapé pour Mariam… Sarkis travaille de nuit comme gardien de restaurant; il passe donc le reste de la journée à dormir.

Pour Mariam, ce n’est pas facile… elle se sent bien seule. Il faut voir son visage rayonnant quand on vient chez elle pour lui faire un massage, soulageant ainsi son mal de dos pour un temps, mais surtout apportant simplement notre présence d’amitié. Elle s’exclame : « Enfin, une fille à la maison ! » et s’empresse de nous offrir une clémentine, un café, un délicieux riz au lait qu’elle a cuisiné pour nous…

Quand elle a commencé à avoir mal au dos, son médecin lui a demandé de cesser toute activité sollicitant son dos. « Mais, nous raconte-t-elle, je ne l’ai pas écouté. » Comment pouvait-elle ne pas tenir sa maison ? « Il faut dépoussiérer, laver et relaver. » nous explique-t-elle. En effet, la poussière d’Alep (sable provenant du désert de l’est syrien) s’infiltre inlassablement dans les moindres recoins (oui, ici, il vaut mieux ne pas être allergique à la poussière !). Ce qui lui fait nous demander : « Vraiment, vous êtes heureuses ici… avec toute cette poussière qu’il faut enlever tous les jours ? Vous êtes vraiment heureuses ici ? », insistant devant notre invariable et enthousiaste « Oui, très heureuses ! »

Cette question, un peu déroutante au début, revient souvent  dans la bouche de nos amis, rendus perplexes par notre présence ici, nous qui venons de France, pays qu’ils imaginent comme un lieu de rêve où règnent le luxe et la vie facile ! En tous cas, la France est perçue ici comme une référence culturelle et les français y sont très appréciés. Le souvenir de la présence française pendant le Mandat marque encore les esprits d’une manière positive. Nous sentons comme c’est important de leur révéler la beauté de leur pays, qu’il voudrait fuir pour beaucoup d’entre eux, rêvant d’un monde meilleur ailleurs... Et notre simple présence opère déjà en eux un changement de regard, du moins une interrogation…


La permanence d’accueil des enfants : lieu de vie et de joie ! 

Chaque après-midi, à partir de quatre heures, la sonnette de notre appartement retentit ! C’est Lisa et sa sœur Liliane, Georges et son petit frère Christian – du haut de ses cinq ans, c’est le plus jeune – Aboud et sa sœur Rime, Zouzou (surnom de Joseph), Naïa ou encore Saloua (voilà pour les plus fidèles !) qui déboulent joyeusement chez nous, remplissant de leurs rires et de leurs cris tout l’appartement, et même au-delà… pour le malheur de notre voisinage !  Une joyeuse bande d’enfants âgés de onze à quinze ans à laquelle se joignent souvent quelques adultes : Hannane, jeune fille de vingt-six ans handicapée d’un bras et d’une jambe suite à la poliomyélite qu’elle a eu à douze ans ; elle aime beaucoup les enfants et vient souvent nous aider ; elle se débrouille bien en français, ça aide pour les traductions ! Il y a aussi Georgette, maman de Lisa et Liliane, qui vient se reposer, bavarder ou boire un thé, et enfin Soutira, maman de trois jeunes adultes, elle a perdu son travail et vient chercher un peu de réconfort, une présence pour combler sa solitude immense. Nous commençons par prier le chapelet dans le salon, chacun son tour récitant une dizaine du chapelet ou un « Je vous salue Marie ». C’est beau de voir cette petite troupe de pré-ados pour la plupart, se recueillir soudain… ou se laisser bercer au rythme régulier des « Je vous salue Marie » ! Puis des petits groupes de quatre, cinq se mettent en place autour d’un jeu de société, un jeu de cartes ou des coloriages, et parfois d’un atelier de perles ou de peinture. Les garçons préfèrent se défouler sur la terrasse autour d’un jeu de ballon, mais gare aux bruits pour les voisins sensibles ! (surtout quand la sieste se prolonge jusqu’à 17h !)

Par le biais du jeu, c’est le sens de l’attention à l’autre, du partage qui se développe, mais aussi l’aptitude à se concentrer, à finir un coloriage commencé, à ranger les jeux que l’on a sortis. Pour certains comme Saloua, quinze ans, qui ne va plus à l’école depuis deux ans, et qui ne sait ni lire, ni écrire, ni compter, c’est l’occasion de s’exercer à des petits exercices tout simples, comme remettre les nombres dans l’ordre, par exemple. Parfois, c’est un cours de français qu’il faut donner, une leçon de lecture, la révision des chiffres ou des jours de la semaine… en prévision d’un contrôle !

 

Enfin, nous partons à la messe, emmenant parfois avec nous l’un ou l’autre enfant qui le souhaite.


Point-Cœur : un chemin d’accueil de la réalité

A travers les rencontres que nous faisons, les événements, la prière, c’est un cheminement qui m’entraîne toujours plus loin pour accueillir la réalité sous toutes ses formes, un chemin d’incarnation.


Hospitalité d’une jeune femme musulmane de Maaloula (près de Damas)

Accompagnées de Sœur Agnès, notre visiteuse, et de Sœur Josette, libanaise (cf. lettre 2), revenue quelques semaines en Syrie dans l’attente de son visa, nous marchons sur le chemin qui nous éloigne du Couvent St Serge et St Bacchus où nous résidons pour une retraite de trois jours. En quête d’un peu d’ombre, nous nous asseyons sur les marches de l’entrée d’une magnifique demeure. C’est alors que d’une maisonnette voisine, la maison du gardien sans doute, une belle jeune femme et sa timide petite fille s’approchent pour nous saluer. Après quelques échanges entre Sr Josette et la jeune femme, dont j’ai oublié le nom, cette dernière, à notre grande surprise, nous invite à entrer chez elle. « Tfaddalu », je vous en prie. Et nous voilà toutes quatre assises sur des coussins à même le sol, à  partager le thé avec une petite famille musulmane, dans la douce chaleur du sobia (poêle au mazout servant de chauffage pour toute la maison et de maintient au chaud des boissons).

Quelle belle rencontre et si inattendue ! Du visage de la jeune femme qui nous accueille se dégagent une douceur et une bonté, une tendresse maternelle en même temps qu’une douce fermeté envers ses deux enfants présents. Elle est d’une féminité et d’une beauté touchantes. Et à travers la simplicité de son accueil des étrangers, loin des idéologies qui divisent et renferment, quelle belle leçon d’accueil de la réalité !

 

Le cri de Marie-Aimée, sept ans, et sa maman Zeina

Zeina, au retour de sa mission du Point-Cœur d’Inde, malgré le refus de ses parents, avait épousé Naji, devenu handicapé très jeune, à la suite d’un accident de voiture. Après plusieurs années de mariage, leur petit miracle arriva : ce fut la naissance de Marie-Aimée. Malheureusement, Naji meurt subitement d’une crise cardiaque en juin dernier. Zeina, que nous rencontrons pour la première fois, nous propose de visionner le power point qu’elle a réalisé à l’occasion des quarante jours de son défunt mari. Les images et les textes qui défilent devant nous sont bouleversants, emprunts de douleur, de foi et d’espérance. Et quand on demande à Zeina comment Marie-Aimée a réagi quand elle lui a annoncé que son papa était parti au Ciel, elle répond : « Elle a crié. Elle a crié : non ! Je ne veux pas que mon papa meurt ! » La réalité lui était apparue aussitôt dure, froide, injuste. « Mais, nous dit Zeina, je ne voulais pas lui cacher, il fallait lui dire tout de suite! ». Et maintenant, elles apprennent tant bien que mal à vivre avec cette réalité, sans révolte. Et ce qui me touche profondément, c’est qu’à côté de cette douleur inextinguible, une paix palpable transparaît.  Quel témoignage d’accueil de la souffrance, de courage, de foi en la vie qui continue ! J’en suis émue jusqu’aux larmes. Quelle beauté ce cri du cœur vers le Père ! Comme je me sens petite… Et je comprends… un peu, « Tu veux au fond de moi la vérité » (Ps 50), le cri de mon cœur, afin de pouvoir y verser Ton baume de paix.


Noël, Dieu vient chez moi

C’est la grâce de Noël qui nous est offerte chaque année : ouvrir tout grand notre cœur au Seigneur qui se fait petit enfant, nous suppliant de lui faire une place dans notre crèche intérieure. « Pour que la grâce de Noël s’actualise dans l’existence de tout homme, il faut que l’Amour rencontre le oui singulier, unique de chacun ». P. Thierry. Que notre cœur soit la mangeoire où il peut naître, que je puisse lui dire : « Viens chez moi ! ». Souvent, je me sens un peu comme les amis quand certaines fois, à leur fenêtre ou sur le pas de leur porte, ils nous interpellent « Viens chez moi ! » plus par politesse que par réelle envie ; ils seraient bien embêtés que l’on vienne, peut-être parce que leur salon n’est pas impeccablement rangé, prêt à recevoir ! Comme beaucoup de nos amis ici, je crois bien souvent que l’enfant Jésus pour naître veut un cœur propre, net, bien rangé à ma manière. J’apprends à recevoir toujours plus Jésus dans un intérieur où se mêlent à la fois le soleil et la poussière d’Alep, la sécheresse et la pluie (qui tombe enfin en Syrie pour la plus grande joie des agriculteurs et de tous les syriens), la joie et la souffrance ! Toutes choses apparemment contradictoires qui pourtant ne sont que des facettes d’une même réalité.

Et cette réalité, quelle est-elle ?

Dieu vient me sauver.

Dieu m’aime.

Dieu aime passionnément chaque Homme.

Et pour rejoindre chaque personne, particulièrement ceux pour qui, comme Léna, Taline ou encore Soutira, Noël résonne comme tristesse, mélancolie, solitude, Il a besoin de notre coopération. « Afin de pouvoir être transmise à un autre, la Parole doit d’abord s’arrêter chez moi, elle doit être accueillie dans mon hôtellerie, elle doit porter du fruit dans ma propre vie. Comme si l’invitation « Allez évangéliser toutes les nations ! » n’avait de sens que si elle était précédée d’une invitation à aller évangéliser les moindres recoins de son être ». En même temps que nos amis, je me confie à vos prières. Léna est notre professeur d’arabe, elle ne se remet pas de la perte de son mari il y a un peu plus d’un an ; Taline est une jeune maman dépressive, qui héberge son frère atteint de schizophrénie, et avec ses deux petites filles jumelles, Vianouch et Hosana, deux ans et demi, elles ne sortent jamais de la maison ; Soutira est une jeune femme dépressive et fragile psychologiquement, qui erre de foyer en foyer par peur de se retrouver seule.


La réalité de l’adoration

Petit miracle du Point-Cœur : Jésus présent 24h/24 dans le tabernacle ! Je goûte, combien l’attitude la plus réelle qui soit, bien que rebutante au prime abord pour notre nature rebelle, c’est celle de l’adoration. Attitude où l’Homme trouve sa juste place devant un Dieu Tout Puissant qui se fait hostie pétrie de fin silence. Moment d’éternité où seule la gratuité de la présence compte, et non plus la durée, ni l’intensité de la prière. Conversation silencieuse d’une âme avec son Dieu.  « Dans le secret, Tu m’apprends la sagesse ». (Ps 50)

 

« Un synode baptisé dans le sang » Mgr Samir Nasar, archevêque maronite de Damas

 Les deux derniers mois ont été marqués par deux événements, l’un joyeux, le synode des évêques qui s’est tenu à Rome du 10 au 24 octobre autour du Pape, cadeau pour redonner espérance et force aux chrétiens de l’Eglise d’Orient, l’autre douloureux, le carnage dans la Cathédrale de Bagdad en Irak, faisant 58 morts et 67 blessés. « Le message de ce Synode baptisé dans le sang, pour dire l’essentiel : LA CROIX est le seul chemin d’avenir. Cette Croix est le compagnon de route depuis l’aube du Christianisme…Il restera notre compagnon de route. Voici la conclusion du Synode que j’ai lue dans les yeux et les larmes des fidèles qui traînent leur souffrance et  leur calvaire avec courage et fierté héroïque … » (Mgr Nasar). Lors de notre rencontre avec Mgr Nasar, nous ressentons fortement combien à travers cet attentat, c’est toute la communauté chrétienne d’Orient qui est touchée et combien grande est la tentation de découragement.

« Nous perdons la patience, mais nous ne perdons pas la foi et l’espérance […] Ce dont nous avons besoin c’est de votre prière et de votre soutien fraternel et moral. Nous avons besoin de votre compassion face à tout ce qui vient toucher la vie des innocents, chrétiens et musulmans. Restez avec nous, restez avec nous jusqu’à ce que soit passé le fléau. » (L’appel des évêques d’Irak). En réponse à cet appel, de jeunes étudiants français ont lancé une belle initiative de soutien et de prière ; il s’agit d`écrire un mail ou un courrier postal pour redonner courage à nos frères d`Irak. A vos plumes !

Je voudrais enfin partager avec vous la très belle amitié nouée avec Fatten, un cadeau merveilleux! Un jour que la fatigue m’avait envahie et que je n’étais pas très encline à faire une visite, j’éprouvais une joie profonde au moment de retrouver Fatten au Der El Adjazé (cf lettre 2). Je réalisais que ce n’était pas le nombre de mots échangés qui me rapprocha d’elle, mais que visite après visite, se tissait mystérieusement une amitié qui me dépassait. La semaine suivante, c’est elle qui, n’ayant pas eu la visite de sa meilleure amie, m’accueillit joyeusement et me serra dans ses bras affectueusement, comme si nous étions amies depuis toujours ! Et mon vocabulaire d’arabe ayant un peu augmenté, j’appris qu’elle aimait lire, se promener et qu’elle avait dansé une fois dans sa vie…

Merci de prier pour nos amis, et peut-être plus particulièrement pour l’un d’entre eux qui vous a touchés tout spécialement. Je suis très heureuse de recevoir tous vos petits mails, lettres et cartes me donnant de vos nouvelles ou partageant vos réactions face à tel ou tel passage de mes lettres ; je me sens ainsi proche de vous. Pardonnez-moi de ne pas y répondre aussitôt, mais ce sont de précieuses attentions au cœur de ma mission. Merci d’avoir pris le temps de lire cette lettre. Je la termine en réalisant comme il est bon de vous écrire pour vous partager un peu ce que je vis ici et ainsi de renouveler mon regard sur mon quotidien et sur les amis. Merci !

Clotilde, Aline et Aurore vous souhaite une très belle fête :

Que la Paix de Noël jaillisse de vos cœurs !

Meilleurs Vœux pour l’année 2011!


Clotilde

« Mais tu veux au fond de moi la Vérité ;

dans le secret, Tu m’apprends la sagesse. "

 Psaume 50 

Quelques photos en bonus…

 

 


Chaque Point-Cœur a son « visiteur », c’est-à-dire une personne engagée dans l’œuvre, qui par ses visites régulières, nous aide dans notre mission

En Orient, une messe est célébrée trois jours, puis quarante jours après la mort du défunt. Il n’y a généralement pas de messe lors des obsèques pour que puissent venir se recueillir toute personne qui le souhaite, chrétienne ou non. Souvent, il n’y a pas assez de place à la maison pour accueillir, alors on voit se dresser une grande tente dans la rue. La famille, les amis, les inconnus y passent pour témoigner leur affection, se recueillir un instant, s’asseoir pour partager un café. En Syrie, la mort côtoie la vie au cœur même de la ville. Des affiches annonçant les récents décès sont placardées partout et régulièrement renouvelées. Lorsqu’un corbillard blanc traverse la ville, annoncé par une petite musique (sirène pour un jeune, comme dans un mariage ; morceau classique pour un arménien…), c’est toute une procession qui se forme autour pour prier ou s’approcher en simple curieux.

[3] In. Point-Cœur, la puissance du simple amour, « Noël ou l’éblouissement du quotidien », Père Thierry de Roucy, fondateur de l’œuvre Point-Cœur.

La sècheresse est telle cette année que vendredi dernier, à la demande du gouvernement, tout le pays était en prière pour demander que tombent la pluie et la neige. Les prêtres célèbrent des messes à cette intention. Il existe même des prières entières écrites pour cela !

Ibid. note ²Sur le site http://1000lettres.wordpress.com ou à l’adresse : Archevêché latin (Babylone) PO. Box 35130Hay Al Wahda-Mahalla
rue 8 – Immeuble 44 Bagdad – IRAK

 Et encore plus de photos et de la musique sur le blog http://clotildeensyrie.canalblog.com/, magnifique travail de Stéphanie de la Ronde, mère de deux anciennes élèves de CP, Marie et Anne. Merci !

 

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29 décembre 2010

Meilleurs voeux pour l'année 2011 !

 Heureuse et sainte fête de Noël !

Que le Christ Sauveur vous garde dans l'Espérance

et vous fasse don de la Paix Profonde !

Bénédiction ubi et orbi de Benoit XVI

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22 octobre 2010

Je suis la servante du Seigneur

       Lettre n°2                                          Liban

    Chère famille, chers amis, chers parrains,                         
   
Je suis heureuse de vous retrouver après bientôt trois mois de mission à Alep. Heureuse et à la fois bien pauvre ! Heureuse de goûter cette posée des questions sur le sens de la souffrance et du sentiment de solitude qui l’accompagne. Et pauvre aussi. En commençant par l’écriture de cette lettre (dur, dur d’essayer de vous faire vivre un peu ce que l’on vit ici !) et bien d’autres choses encore qui m’invitent au détachement de moi-même, à un certain dépouillement pour m’ouvrir au tout Autre afin de m’ouvrir à mes sœurs paix profonde née de la certitude que ma place est bien là, au service des plus pauvres, et du sens profond que j’y trouve après m’être de communauté#, à ceux que je suis venue servir. 

« Il n’y a que l’Amour

qui puisse nous permettre de communiquer la lumière ». 
      

Alors j’apprends ! en repensant au petit garçon dans Himalaya ou l’enfance d’un chef, qui, les yeux brillants de curiosité et d’envie, avec toute sa simplicité d’enfant, demande à son grand-père : « Tu vas m’apprendre ! » A l’école de Passang, j’apprends à me faire comprendre en arabe, à faire la cuisine ou la vaisselle dans une pièce exigüe sans lumière naturelle et dans une chaleur étouffante les jours de grande chaleur, à me tenir aux horaires et à me laisser déranger par les imprévus, à faire confiance, à composer avec les humeurs et les caractères de chacune, à être patiente… surtout avec moi-même.
J’apprends à regarder ! avec les yeux du cœur, sans rester à la périphérie des choses ! pas facile et il faut cent fois remettre l’ouvrage sur le métier ! regarder les fragilités et les grandeurs de mes sœurs de communauté comme  je regarde les miennes qui m’interrogent ou m’édifient, mais qui toujours m’entraînent à aller plus loin ; « Aime ton prochain comme toi-même » ; regarder la culture de ce pays qui m’émerveille et m’étonne parfois ! et enfin regarder d’un regard tout nouveau les pauvres que nous servons…

Notre petite communauté en construction m’émerveille chaque jour un peu plus ! toute fragile qu’elle est parce que toute humaine ! Et c’est justement là qu’est toute sa grandeur ! Je vous le disais dans ma première lettre, nous sommes quatre mais pour l’instant Anne est en France pour prendre un peu de repos ; elle reviendra pour l’Avent. Je la confie à vos prières. Elle a 42 ans et vit ici au Point-Cœur d’Alep depuis 12 ans, c’est-à-dire depuis l’ouverture du Point-Cœur. Elle a vu passer toutes les amies des enfants# et connaît l’histoire de chacun des amis du quartier dont elle est très appréciée. Aurore vient de Tour, elle a 22 ans et comme animatrice-directrice de centre de loisirs, elle aime beaucoup les enfants, et elle aime rire… d’elle-même aussi ! Aline, la plus jeune puisqu’elle a 20 ans, en  étude de droit à Aix-en-Provence, apporte toute sa fraîcheur (euh oui… à l’origine, elle est bretonne!) et son sourire quasi-inaltérable (à 99,99% !). Enfin, moi-même, institutrice, 32 ans tout juste ; pour moi ça semble être une affaire de famille de partir avec Point-Cœur : mon frère Aymeric est depuis maintenant 8 mois en Inde ! Voilà ma nouvelle petite famille, et pour moi qui n’ai pas de sœur, j’en ai gagné 3 ! Et pas seulement parce qu’ici nous sommes appelées « sœur »… En arabe ça fait « rahbat » (avec un r roulé) ou « ma soeur » ! (un des quelques mots français intégrés à la langue syrienne, restes du mandat français de 25 ans). Notre vie de communauté est toute simple et faite: de services (comme préparer le café à la syrienne… avec amour !), de fous-rires pendant les vêpres# quand épuisées par une journée bien chaude, nous écorchons les mots ou les mélodies, de bâillements en relais pour éviter les blancs pendant la psalmodie des laudes#, de repas qui se prolongent parfois par une soirée jeux ou chants quand emportées dans nos discussions, nous ne voyons pas le temps passer, de délicatesses qui m’édifient ( le jour de mon anniversaire fut un feu d’artifice de surprises du matin jusqu’au soir !), d’incompréhensions qui poussent… à comprendre, à connaître, se connaître, à demander pardon et à accueillir le pardon... à sortir de son petit moi étroit pour aller rejoindre le cœur de l’autre… et souvent, à reconnaître sa soif d’amour et à venir mendier humblement auprès de Celui qui nous a réunies, auprès du cœur de Jésus, son regard, de nouvelles forces pour aimer. J’y retrouve la description de la communauté que fait Jean Vanier dans son livre#, et en même temps, elle la dépasse, l’approfondit par son unicité parce que chacun de nous y apporte sa couleur personnelle et unique. Ca me fait un peu penser à l’Eglise ou à n’importe quelle communauté de personnes quelle qu’elle soit. La rencontre en profondeur des personnes qui la composent vaut mieux que tous les discours dessus ! « Venez et voyez !» (heu… pas tous en même temps !)
L’organisation des journées se déroulent à peu près de la manière suivante : le matin, nous commençons par prier les laudes au sortir du lit puis après le petit-déjeuner, nous prenons chacune une heure d’adoration à tour de rôle pendant que les autres accomplissent leur service (cuisine, vaisselle, ménage). L’après-midi, un temps libre est prévu pour la sieste, la lecture spirituelle ou l’apprentissage personnel de l’arabe. Une permanence d’accueil des enfants est assurée entre 16h et 18h, et s’ouvre par la récitation du chapelet. Les jours où il y a peu d’enfants, deux d’entre-nous partent en visite dans le quartier. Puis vient l’heure de la messe, suivie d’une visite aux amis. Avant le dîner, nous prions les vêpres, et le soir, nous terminons notre journée par le « R-V à Marie », temps de pardon et de remerciement. A cela, s’ajoutent un à deux cours d’arabe par semaine, les apostolats# du samedi matin et les invitations à déjeuner. Lundi c’est une journée de repos (il est bon ce jour-là de se mettre un peu à l’écart de la communauté). Une fois par semaine, nous nous réunissons pour établir un bilan de la semaine passée et mettre au point le programme de la semaine suivante. Enfin, « l’école de communauté » hebdomadaire nous réunit pour un partage d’expériences personnelles autour d’un texte. Et depuis peu, nous prenons un petit temps pour chanter en chorale.
    Que dire d’un pays si peu connu en France (moi la première, je le situais à peine sur la carte)… si ce n’est par ses savons, les fameux savons d’Alep ! Maintenant, je peux vous le dire, il gagne à être connu ! Et pourtant, certaines choses de la culture orientale me surprennent, parfois choquent mon regard d’occidentale (jeter ses papiers dans la rue, le regard porté sur la femme, parfois complètement voilée,  l’ambiance très masculine et le regard insistant des hommes (pas discret du tout !) dans le bus ou dans la rue, jouant au backgammon# ou sirotant un café sur le trottoir). Ce pays encore authentique gagne à être connu ! Et pas seulement pour sa richesse culturelle qui n’est pas des moindres (la ville d’Alep est classée au Patrimoine Mondial de l’Unesco : Citadelle et Souks très anciens), sa richesse historique (la Mésopotamie est le berceau de l’humanité) et sa richesse religieuse (la région fut le berceau du christianisme - St Paul y reçut le baptême à St Ananie - et accueille en son sein une grande diversité de rites chrétien et orthodoxe coexistants avec la religion musulmane), mais aussi et surtout pour ses habitants car rien ne vaut la richesse d’une rencontre avec ses habitants pour connaître un pays dans ses entrailles.

Et Sœur Josette, une sœur de Points-Cœur, libanaise, ne nous dira pas le contraire ! Elle vient de passer quelques jours dans notre Point-Cœur d’Alep et son témoignage m’a beaucoup touchée. C’était la première fois qu’elle traversait la frontière pour venir en Syrie, pays dont elle avait une idée bien précise à cause de la guerre qu’elle a vécu de plein fouet ces dernières années. Pourtant, au grand étonnement de ses proches et de son frère gentiment moqueur, elle rentrera chez elle en partageant un très sobre: « C’était très beau ! » qui en dit long quand on connaît son histoire. Elle nous raconte l’expérience bouleversante qu’elle a faite au Point-Cœur de Naples il y a quelques années. « Un jour, Père Guillaume m’annonce qu’un prêtre syrien va venir passer le WE au Point-Cœur et me demande ce que je compte faire… Sans hésitation je lui réponds que je ne serai pas là. Il me demande alors de réfléchir… mais c’est toujours la même réponse : je ne veux pas, je ne peux pas… Père Guillaume me dit alors : « Moi, j’aimerais bien que tu sois là »… et maintenant, je l’en remercie ! Cette rencontre m’a bouleversée, elle a marqué un tournant dans mon cœur et dans ma pensée. » L’ennemi qu’elle croyait trouver en ce syrien avait un visage désormais, une histoire. Et elle ajoute : « Parfois, il suffit d’une rencontre, d’un regard.» De plus, c’est toute sa pensée sur la résistance face à l’ennemi qui s’en est trouvée chamboulée. L’ennemi n’était plus à identifier à l’extérieur mais en elle-même.

                « C’est l’homme lui-même qui est appelé à devenir le royaume de Dieu ».

Maurice Zundel

La Syrie est à l’image de son peuple, un peuple attachant et étonnant tout à la fois, jeune, vivant, raffiné dans sa toilette, le soin du corps et de sa coiffure (ou de sa barbe : barbiers, coiffeurs et manucures sont très prisés ici), prodigue dans son langage et sa musique, orientale uniquement, résonnant dans la rue dès le petit matin (pendant les laudes, quand vous n’arrivez pas à vous réveiller après une mauvaise nuit, un air de Fairouz vous réconcilie avec la vie !). Prodigue également dans son accueil (quand on croise nos amis dans la rue, sur le pas de leur porte ou accoudés sur le rebord de leur fenêtre, ils ne manquent jamais de nous dire : « Venez chez nous ! »). Mais ce qu’ils aiment par-dessus tout, il faut le dire, c’est parler de la vie des autres! Et maintenant que nous comprenons un peu mieux l’arabe, nous surprenons parfois des amis ou des passants, en train de parler des « françaises » !               

Ils m’enseignent par leur capacité à se laisser déranger quand nous venons les visiter à l’improviste et à tout arrêter pour se mettre dans une totale disponibilité ; ils m’enseignent par le soin qu’ils apportent au rangement de leur salon toujours impeccable, prêt à recevoir ; ils m’enseignent par la solidité de leurs liens sociaux, la solidarité et la beauté des relations entre les membres d’une même famille. Il n’est pas rare de voir vivre dans le même appartement ou le même immeuble les trois générations ensemble. Les maisons de retraite sont encore rares ici ; ceux qui s’y retrouvent souffrent donc d’une profonde solitude.

 

Alep_centre_ville__13_

Alors, bien au-delà des caractéristiques culturelles liées au pays, c’est le visage de nos amis, leur histoire, leur souffrance et leur joie qui m’habitent toujours un peu plus à chaque nouvelle rencontre. Le visage de Fatten, de Soutira, de Lilianne… et de tant d’autres. Ceux-là même que je suis venue servir, ce sont eux qui m’enseignent, ce sont les pauvres

« Les pauvres sont nos maîtres ». St Vincent de Paul

Ils m’enseignent par leur pauvreté, leur vulnérabilité… ce qui fait notre humanité… leur vulnérabilité offerte. Ils sont la Présence du Christ proche, souffrant, impuissant, aimant…
’enseignent le chemin du cœur avec ses pauvretés que je voudrais laissées enfouies, et à travers cela, ils m’enseigne

Ce samedi-là, c’est la rencontre avec Fatten qui m’apprend beaucoup. Fatten est une jeune fille qui a une paralysie des membres inférieurs et que sa maman, ne pouvant plus garder, a confiée à la Maison de retraite, Der El Adjazé. Pour Fatten, ce n’est pas évident de se retrouver la seule jeune parmi des personnes âgées. Der El Adjazé est un de nos deux lieux d’apostolat du samedi matin. C’est la deuxième fois que je m’y rends. Après avoir échangées avec plusieurs résidentes, nous arrivons auprès de Fatten. Assise sur son lit, elle est en train de manger un sandwich à base de pita, sorte de galette de pain sans levain que l’on mange en Orient. Elle le porte à sa bouche de sa main toute tremblante, et au lieu de le mettre en une fois dans sa bouche, elle s’y reprend à trois ou quatre fois, sa tête se balançant dans un mouvement immaîtrisable, ses yeux clignants frénétiquement. Tout son corps en est ébranlé. Et cela recommence pour chaque bouchée. Ma première réaction est de détourner le regard pudiquement comme pour fuir la vue d’un spectacle gênant, qu’il serait presque indécent de regarder. Ce faisant, je me tourne vers mes voisines. Anne et Aline n’ont pas bougé.  Je pose alors à nouveau doucement mon regard sur Fatten. Plus tard, dans ma prière devant Jésus en Croix, le corps disloqué de Fatten me revient en mémoire et je comprends un peu.
Comme le Christ offrant à nos regards son corps torturé par la souffrance, Fatten offre humblement sa pauvreté, son impuissance à maîtriser les mouvements de son corps rebelle. Le Christ présent dans l’eucharistie… Il est là, devant moi. Il est là, en Fatten, le Christ souffrant en elle, le Christ portant la souffrance avec elle, le Christ qui vient rejoindre nos infirmités et nos faiblesses.   « Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ». (Evangile, Jean, 15, 13).Lui qui était riche, Il s’est fait pauvre pour que nous puissions l’approcher.
Qu’elle est belle Fatten ! Qu’elle est belle dans sa pauvreté ! Et qu’elle est grande !


Elle m’invite à dépasser les apparences pour entrer dans le mystère de la souffrance, qu’à première vue je préférerais dissimuler ou bien fuir à toutes jambes, parce qu’il me révèle mes propres limites.

Comme je l’évoquais plus haut, nous avons été invitées au Liban dans la famille de Sœur Josette. Ce fut l’occasion d’une sortie en communauté pour découvrir la culture libanaise, mais aussi pour faire connaissance des amis de l’ancien Point-Cœur de Beyrouth (qui a dû fermer en 2007 à cause de la guerre).
Nous découvrons un pays qui a un pied en Orient, un pied en Occident, mélange de deux cultures à travers la langue arabe qui a intégré de nombreux mots anglais et français, la musique mêlant aux mélodies modernes des accents orientaux, le développement du pays à deux vitesses. Un pays très vert ! Quel bonheur ! Des arbres immenses et nombreux : les pins parasols, les cyprès et bien sûr, les cèdres, « monuments naturels les plus célèbres » (Lamartine).
« Le Liban ce n’est pas un pays, c’est un message » avait lancé Jean-Paul II, venu prier au pied de Notre-Dame de Harissa. De nombreux saints, en majorité maronites y ont proclamé l’Evangile par toute leur vie.
C’est beau de voir combien les amis de l’ancien Point-Cœur de Beyrouth sont touchés par notre présence, la présence de notre Point-Cœur leur faisant un peu revivre le leur. Chaddia, qui était un peu comme « la maman du Point-Cœur », se fait une joie de nous emmener visiter quelques lieux magnifiques près de Beyrouth : l’imposant monastère grec catholique au sommet de son écrin de verdure ; Sidon, et un peu plus haut, le lieu où Marie, avec d’autres femmes, attendait son Fils Jésus, parti évangéliser la ville païenne, les femmes ne pouvant y entrer. Il y a aussi la rencontre émouvante avec Zéna et sa fille de 7 ans, Marie-Aimée. Zéna, partie 14 mois au Point-Cœur d’Inde, nous commente avec émotion les photos de son album où reprend vie soudain ce petit garçon qu’elle aime tant. Enfin, la maman de Sœur Aïfa, actuellement au Point-Cœur du Salvador, nous accueille comme des reines, proposant à nos yeux ébahis, une quinzaine de mets délicieux ! Sans parler de l’accueil, de la disponibilité, de l’attention prodiguée par Sœur Josette et sa famille, alors même que son grand-père, très malade, est à l’hôpital dans un état critique. Comme c’est beau de voir toute la famille soudée, réunie autour du grand-père malade !

Je termine par mentionner une grande fête, celle de Points-Cœur, Notre-Dame de Compassion, fêtée le 15 septembre: grande parce que nous étions tous en communion entre membres de l’Oeuvre pour rendre grâce ! Mais ce qui m’a marqué le plus ce jour-là, c’est que la grandeur de cette fête n’a pas résidé dans la grandeur apparente - le nombre d’invités se réduisant à nos amis les plus proches – bien que nous ayons eu une très belle messe chantée et partagé un délicieux gâteau (Merci Aurore !), mais dans la simplicité et la joie de ceux qui sont venus, de Soutira à la fois étonnée et heureuse d’être invitée, de Sœur Josette, entourée par les enfants excités, tellement heureuse d’être en Syrie pour cette grande fête… ces belles choses rendues possibles par la présence humble et joyeuse de Marie, notre Mère.

Je voudrais encore remercier chacun d’entre vous d’avoir accepté de me soutenir et de partager ma mission, particulièrement ceux que je n’ai pas encore pu remercier, faute de temps. Profondément heureuse de vivre cette expérience en communion avec vous, je me confie à vos prières, ainsi que ma communauté et toutes les personnes que nous connaissons ici. Soyez assurés de ma prière fidèle et de mon amitié, dans la joie de recevoir bientôt de vos nouvelles et les intentions de prière que vous souhaitez me confier!


Je vous confie ma grand-mère Monique Dognin, qui a rejoint mon grand-père au Ciel trois jours avant mon départ en Syrie. « Et si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec Lui ». St Paul (extrait du texte lu à  la messe d’enterrement). Je vous confie les chrétiens du Moyen Orient pour lesquels se tient en ce moment, du 10 au 24 octobre, le Synode des évêques à Rome.


                     

    Avec ma profonde et joyeuse amitié,
                                           Clotilde

 

clotilde



P.-S. : Si vous souhaitiez parrainer ma mission, sachez qu’il n’est pas trop tard : par un don en ligne http://france.pointscoeur.org/. ou par retour de courrier à Points-Cœur.

P.-S. ² : Le courrier peut mettre entre quinze jours et un mois à arriver (voire plus). Pour information, il faut éviter tout sujet politique. Je viens de recevoir mes premières lettres avec une joie immense : merci !!! Bon courage pour la reprise ! Bonnes vacances pour ceux qui les prennent maintenant !

Liban

Clotilde DOGNIN

Point-Cœur Bienheureuse-Mariam

Vicariat Apostolique Latin

B.P. 327

ALEP

Syrie



14 septembre 2010

La vie est grande, bonne, passionnante, éternelle

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 le 25/08/2010  (reçue le 3/09/2010) Lettre n° 1


Chère famille, chers amis, chers parrains,

Que de choses se sont déjà passées, que je voudrais partager avec vous ! Par où commencer ? Les trois semaines qui viennent de s’écouler ont été si denses ! Ce fut le temps des découvertes, des rencontres, des apprentissages…

Je vous remercie de tout cœur de me permettre d’être là, cette année, au Point-Cœur d’Alep grâce à votre générosité et votre fidélité. Merci de votre soutien, infiniment précieux, qui rend chaque journée si belle. Vous êtes dans mes pensées et prières chaque jour, avec une pensée toute particulière pour les enfants et leur famille, et les professeurs à l’approche de la rentrée scolaire. Cette mission étant aussi un peu la vôtre, je vais essayer de vous faire vivre mes premiers pas dans mon nouveau lieu de vie…

Mardi 3 août, Aline (qui vient d’Aix en Provence) et moi-même, montions à bord de l’avion. “Un voyage qui nous mènera on ne sait où… Extérieurement, on sait à peu près, mais intérieurement… !” Quoique même extérieurement, on commence à se demander un peu… L’avion prévu à 16 h 25 est toujours au sol ; il est 19 h 45 ! À l’aéroport d’Alep, nos patientes hôtesses, Anne et Aurore nous accueillent avec un large sourire (après deux heures d’attente… Anne vit au Point-Cœur depuis douze ans comme permanente (laïque consacrée) ; Aurore vient de Tour. Voilà notre petite communauté au grand complet ! Je découvre avec plaisir ma nouvelle demeure, simple et paisible, dans le quartier de Téléphone Hawaï (nom donné au quartier depuis la Seconde Guerre Mondiale où il y avait de longues antennes téléphoniques).

Premières impressions : ktir chob (très chaud) ! Il est 5 h 00, on voit au loin par-dessus les centaines d’antennes paraboliques, les premières colorations du soleil levant depuis la terrasse de notre appartement du troisième étage. Après une bonne douche, nous voilà rapidement au lit… enfin, au matelas. Nos quatre matelas sont installés dans le salon rafraîchi par les hélices des ventilateurs. Bientôt, nous nous replierons sur la terrasse en quête de quelque fraîcheur, emportant chaque soir notre matelas à la façon syrienne. Nous finissons par nous réveiller, assommées que nous étions par la fatigue et la chaleur cuisante qui s’infiltre maintenant par les volets. Les ventilateurs ne tournent plus car depuis déjà 8 h 00 “ma fi caraba”, ce qui signifie “il n’y a pas d’électricité” ; et non pas “ma fée carabosse” ; quoique ça aide bien à retenir ! Mais nous retiendrons rapidement l’expression car les coupures d’électricité, et d’eau (ma fi maï), sont quotidiennes : il n’y en a pas assez pour tout le monde. Orgie de klaxons et voix fortes des commerçants se mêlent en un merveilleux concert qui achève de nous réveiller. Le klaxon ! Ici, c’est l’outil indispensable, et même vital ! Il signifie alternativement, “je suis là”, “je passe” ou “j’ai de la place dans mon taxi”… On a tôt fait d’apprendre que le piéton n’est pas prioritaire ; il n’y a pas de “passages pour piétons” dans nos quartiers, alors pour traverser parfois, on n’a pas d’autre choix que de se lancer au milieu du flot de voitures, et surtout sans hésiter…

Un autre mot que nous retenons vite, c’est “jdidé”, nouvelles, mot prononcé par Anne pour présenter les deux nouvelles, Aline et moi, aux amis du quartier. Lors de nos visites, nous pouvons vérifier que le fameux accueil syrien n’est pas une légende ! Les amis ne nous connaissent pas encore mais déjà, ils nous manifestent toute leur affection. C’est touchant de voir combien nos visites sont attendues (souvent, la visite commence par “ça fait longtemps que vous n’êtes pas venues !”) et combien notre présence, la présence de Points-Cœur est importante pour eux ! Je touche maintenant du doigt cette réalité que je n’avais fait qu’effleurer lorsque je présentais l’Œuvre Point-Cœur à mon entourage en France. Nous ne faisons presque rien mais ce presque rien est essentiel pour eux. C’est beau de voir cette amitié avec Points-Cœur à travers le visage des Amies des enfants (nom donné aux bénévoles) qui ne font que passer… Ils demandent des nouvelles des anciennes, de leur famille. Leïla qui connaît le Point-Cœur depuis son ouverture nous énumère les prénoms de toutes les Amies des enfants qui sont passées ! Impressionnant !

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Je vous parlais de l’hospitalité syrienne ; il me vient à l’esprit tant de beaux moments d’accueil qu’il me faudrait plus de trois pages pour tout vous raconter, les milles petits gestes d’accueil : offrir un bonbon au visiteur, des friandises, une boisson : sirop de datte ou de rose (spécialité d’Alep), café… le nombre incalculable de fois (au moins 10 !) où la maman de Jude nous a souhaité la “Bienvenue !” pour nous témoigner toute sa joie de nous recevoir chez elle. “Ahla u sahla” résonne encore à mes oreilles comme un refrain !

Thérèse et Vartan, une des familles les plus pauvres que nous visitons, m’ont beaucoup marquée par leur généreux accueil ! Petite famille arménienne qui habite à “Midane”, un quartier très populaire, mixte mais à majorité musulmane. Dans le hall, mare d’eau boueuse, immeuble plus que vétuste. Thérèse nous ouvre la porte, radieuse de notre visite. La petite Mariana, sept ans, n’a pas l’air d’aller bien ; elle fait la moue. N’ayant pas d’autre langage pour l’instant que celui des gestes, j’attrape un ballon qui traîne par terre et le lance à Mariana, qui me le renvoie. Son visage s’ouvre peu à peu ; puis saisissant un crayon de couleur, elle fait mine de se maquiller… Elle s’ouvre tellement qu’elle est tout excitée et veut que nous fassions de la gymnastique ! Mais l’électricité vient d’être coupée, le ventilateur s’est arrêté… avec cette chaleur… Impossible ! Vartan arrive et après le chaleureux “Ahla u sahla” (Bienvenue !), il se précipite pour aller acheter des boissons malgré les vives protestations d’Anne qui n’y feront rien. Il revient avec une petite bouteille de boisson gazeuse pour chacun. Thérèse nous offre des gaufrettes au chocolat. Anne prétextant des maux de ventre, tente de refuser mais en vain, elle lui donne cinq paquets de biscuits à emporter pour manger plus tard. Ils n’ont rien mais ils donnent tout ! Thérèse est malade depuis deux mois, elle a de la “nervosité dans l’estomac” (traduction littérale de l’arabe). De plus, Thérèse et Vartan sont inquiets pour leur petite fille qui a échoué à ses examens de CP, elle doit redoubler ; elle ne sait pas lire ni écrire et ils craignent qu’elle n’y parvienne pas ; Thérèse elle-même ne sait ni lire ni écrire. Ils ont tous deux une foi magnifique, forgée par l’attente confiante d’“apporter au monde” un enfant (selon l’expression utilisée ici). Au bout de douze ans, ils ont enfin une fille, Mariana. Hamdella ! (Grâce à Dieu !). Ils aiment à prier pour les parents qui peinent à avoir un enfant. Vartan me demande combien nous sommes dans la famille, puis il ajoute : “Que Dieu garde tes parents et tes frères !”

“ Hamdella !” (Grâce à Dieu) : c’est une des innombrables formules de politesse utilisée ici. Celle-ci sert souvent à répondre à la question : “Comment allez-vous ?”. Et pour souhaiter que le moment chez le coiffeur ou sous la douche fut bon, on dit : “Neïman” (y compris quand tu bois à la syrienne, c’est-à-dire, à la bouteille sans toucher le bord, et que tu t’es arrosé en même temps !). Pour remercier, il y en a tout une palette : tout en reposant son verre, on dit : “Deïmé” (que vous puissiez toujours accueillir comme cela) ; pour remercier après un travail manuel (la vaisselle, le ménage…): “ Islamo ideïki” (que tes mains soient bénies). Cette variété d’expressions pour remercier, témoignant d’une attention aux personnes et à ce qu’elles font dans les petites choses du quotidien me plaît beaucoup ! Elles plaisent aussi beaucoup à nos hôtes, touchés et étonnés de nous entendre déjà parler arabe ! Du moins le croient-ils !

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Pour le moment, les conversations sont pour moi comme des hiéroglyphes qu’il me faut déchiffrer. Parfois, au milieu de cette chaîne de sons continue, surgit un mot que je reconnais. Victoire ! Je ressens alors la joie de l’enfant qui déchiffrant un mot avec peine, voit soudain ce mot prendre sens et s’animer ! La joie de voir son univers se peupler de nouveaux êtres est sa récompense ! Ma récompense est d’entrer chaque fois un peu plus dans l’univers de nos amis. Les cours d’arabe intensifs sont là pour nous y aider : “L’arabe sans larme (…mais non sans peine !) ” c’est le nom de notre méthode d’apprentissage ! Et s’il y a parfois des larmes, ce sont plutôt des larmes de rires quand, avec Aline, nous prononçons un mot pour un autre tellement les sons se ressemblent pour des néophytes… Nos professeurs Dolly et Lynn font preuve de grande patience et nous font parfois répéter jusqu’à cinq ou six fois de suite le mot, afin de trouver la juste prononciation… Les progrès arrivent doucement… grâce aux encouragements de nos professeurs et de nos interlocuteurs ! Il nous faut nous aussi nous armer de patience lorsque nous aimerions comprendre ce que veulent nous dire les enfants dans nos jeux !

Si l’inculturation passe par la langue, elle passe aussi par la nourriture ; je découvre les délicieuses spécialités d’Alep et de la région : pistaches fraîches, hommos (purée de pois chiche), moutabbal (crème d’aubergine), fattouch (salade à base de bali, concombres, tomates, lamelles de pain sans levain grillé) et galettes de tannour (sorte de pizzas au thym, fromage ou piment) : un délice ! Pour le dîner, nous adoptons la coutume syrienne qui consiste à partager différents petits plats (mezzé) disposés sur la table. Très convivial !

Un coup de canon éclate dans la ville ; il est 19 h 30. C’est l’annonce de la fin du jeûne pour la journée. En effet, depuis le 11 août, le Ramadan a commencé pour un mois : les musulmans ne doivent ni boire, ni manger depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher, en ce moment, de 5 h 00 à 19 h 30. Ils se réveillent à 4 h 00 pour avaler quelque chose d’un peu consistant, puis se recouchent jusqu’au petit matin. Samedi matin, lors de notre visite à “SOS Village d’enfants”, Anne demandait à un jeune garçon de treize ans s’il avait bu ce matin. Il nous confirma qu’il n’avait rien bu et nous proposa aussitôt un verre d’eau. Tout naturellement, Anne refusa en expliquant : “nous faisons jeûne avec toi”. Encore une belle leçon d’hospitalité syrienne ! Le jeûne est particulièrement difficile à cette période de l’année, les journées étant plus longues l’été, et d’autre part à cause des fortes chaleurs endurées depuis le début du mois. Nos amis nous disent qu’ils n’ont jamais vu de chaleur aussi forte, et pendant si longtemps. Nous voilà rassurés… le plus dur est derrière nous ! Durant le Ramadan, tout le pays est transformé ! Les journées sont plus calmes et les nuits plus animées ! Chaque soir, à l’approche de la rupture du jeûne, il faut voir les rues animées, colorées, embouteillées sur un fond de concert de klaxons ; chez certains commerçants, on se croirait à la bourse, chacun tendant ses billets en direction du vendeur… Et soudain, plus rien, les rues sont vides ; chacun se retrouve en famille et avec les voisins pour vivre un temps de partage et de fête. Situation cocasse, s’il en est !

J’aurais encore tant de choses à vous partager sur la riche culture de ce pays, les belles rencontres que nous vivons, notre vie de communauté au Point-Cœur, mais j’ai assez pris de votre temps pour aujourd’hui et vous remercie d’avoir pris le temps de me lire.

En attendant, je vous renouvelle l’assurance de mes pensées et prières pour chacun d’entre vous (spécialement le jour de votre date anniversaire ; pouvez-vous me la communiquer si ce n’est déjà fait ?). Je vous confie nos amis du quartier (ceux qui vous sont déjà un peu familiers par cette lettre…) et notre communauté, tout particulièrement ces jours prochains où elle va connaître un peu de changement puisqu’elle sera réduite à trois (Anne sera absente trois mois à partir du 17 septembre).

Avec ma profonde et joyeuse amitié,

 

Clotilde

 

clotilde


P.-S. : Si vous souhaitiez parrainer ma mission, sachez qu’il n’est pas trop tard : par un don en ligne http://france.pointscoeur.org/. ou par retour de courrier à Points-Cœur.

P.-S. ² : Le courrier peut mettre entre quinze jours et un mois à arriver (voire plus). Pour information, il faut éviter tout sujet politique. Je viens de recevoir mes premières lettres avec une joie immense : merci !!! Bon courage pour la reprise ! Bonnes vacances pour ceux qui les prennent maintenant !

Liban

Clotilde DOGNIN

Point-Cœur Bienheureuse-Mariam

Vicariat Apostolique Latin

B.P. 327

ALEP

Syrie

 


6 septembre 2010

La vie des Volontaires

Volontaires 2010-2011 - Trombinoscope

Notre-Dame-du-Monde-Entier, maison de formation à Vieux-Moulin (Oise)

Durant la forma tion ache vée en février 2010, cinq jeunes volontaires se sont pré­parés à partir et sont actuelle ment en mis­sion. Pendant le stage de juillet, sept autres ont achevé leur formation et en septembre ils seront quinze que vous pourrez alors découvrir.

Crédits Photos : F. Fadier , E. Pêtre et A. Gallot pour Points-Cœur


Clémence (Italie) Marie-Domitille (Italie) Clotilde (Syrie)Marie (Thaïlande) Thérèse (USA) Valérie (de La Réunion) Yohann (Brésil) Aline (Syrie) Nathan (Chili) Aurore (Syrie)Karen (Philippines) Ariane (Sénégal)

Les 3 piliers de la vie des volontaires

- La vie de prière : une rencontre avec le Christ. Les volontaires sont d’abord chercheurs de Dieu. Ils découvrent vite la nécessité de puiser dans la prière la force d’aimer toujours plus.

Communauté au Kazakhstan- La vie de communauté : une rencontre avec soi-même et les autres membres de la communauté. La communauté est cimentée par le pardon et le respect mutuel. C’est le lieu de la croissance et de la propagation de l’amour.

- La vie de compassion : une rencontre avec les plus pauvres. L'Amitié rejaillit auprès des enfants et des personnes blessées. Celles-ci ont la certitude de trouver au Point-Cœur un foyer d’amour.

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3 septembre 2010

A Alep.....

alep

Ma Maison est ta Maison 

Le Point Coeur d'Alep

Le Point-Cœur

Israel Kamakawiwo'ole - Somewhere Over The Rainbow (Subtitulada al Español)

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Somewhere over the rainbow

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Somewhere over the rainbow

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bongiovi81 | 13 janvier 2009
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Clotilde en Syrie
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